Le 1er mars est devenu une journée symbolique de grève des migrants transnationaux. Les militants n’utilisent pas seulement l’expression « grève » dans son sens littéral lié au travail et à la force de travail – ils veulent aussi faire grève contre la banalisation actuelle du racisme.
Les protestations transnationales du 1er mars ont été lancées aux Etats-Unis en 2006 et ont invité les migrants d’autres pays comme la France, l’Italie, l’Espagne et la Grèce en 2010 à organiser et prendre des initiatives ce jour-là. Sous le slogan « 24 heures sans nous », les migrants ont montré clairement l’importance de leurs contributions au fonctionnement de la vie quotidienne de nos sociétés. En Autriche, la première grève des migrants transnationaux a eu lieu en mars 2011, sous la forme d’actions communes, telles qu’une manifestation, mais aussi sous la forme de nombreuses actions locales.
Les militants se considèrent eux-mêmes comme appartenant à un mouvement transnational. Même si il n’y a pas eu d’actions communes à ce jour, les protestations et les revendications s’inspirent mutuellement dans le monde. L’échange d’expériences, la tentative de parvenir à des changements à partir du niveau national et le lien avec les grévistes et les manifestations dans d’autres pays et villes – notamment par la projection de vidéo sur les murs au cours des manifestations – sont considérés comme très importants.
La restriction de l’immigration et du droit d’asile dans toute l’Europe entraîne la mise en détention des réfugiés et installe des barrières pour les migrants non-qualifiés dans un domaine particulier ; des freins sont mis au regroupement familial et les tests de langue sont un préalable obligatoire pour avoir l’autorisation de rester et de travailler légalement dans un pays. Au lieu de reconnaître les chances et les avantages qu’apporte une pluralité de langues et d’apprentissages de la langue maternelle, la politique est d’imposer aux migrants des règles strictes d’apprentissage de la langue officielle. Les migrants sont obligés d’utiliser ce qu’on appelle la langue « native » (d’autres langues « occidentales » sont aussi les bienvenues) au travail et à l’école. Dans l’espace public, la domination des langues officielles le montre, même si, par exemple, une loi constitutionnelle impose, en Autriche, d’avoir des panneaux routiers bilingues dans les régions où existent des minorités nationales reconnues, cette pratique est contestée. C’est pourquoi, cette année, les actions du 1er mars, en Autriche, mettront l’accent sur une grève de la langue. L’objectif est d’exprimer le refus d’obéir à l’usage exclusif d’une langue de domination.
Une des spécificités de la pratique politique de la grève des migrants transnationaux est la grande importance accordée à la culture et l’art. Elle renouvelle les slogans toujours identiques et quelque peu ennuyeux. Une autre différence par rapport aux politiques de gauche traditionnelles, c’est la volonté d’organiser avec les réfugiés et les migrants, d’apprendre des expériences des uns des autres, de mettre l’accent sur l’autonomisation et de refuser tout regard de victimisation ainsi que la condescendance qui consiste à parler à leur place.
L’appel du groupe à la grève des migrants viennois, cette année dit que le 1er mars sera une journée de mobilisation, de colère, de sensibilisation en s’exprimant par la voix et la grève. Nous invitons tout le monde indépendamment des identités transgressives et des appartenances ethniques à se joindre à cette protestation et à faire grève contre le racisme. Profitons de cette journée pour associer nos différences pour trouver un langage commun nouveau. Nous en finissons à la division entre Nous et Vous. Nous sommes tous l’avenir !