Une définition largement acceptée de l’antisémitisme est nécessaire pour servir de base à l’élaboration de contre-stratégies. En 2016, afin de lutter contre l’antisémitisme, lequel est en augmentation dans de nombreux pays, l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) a adopté la Définition opérationnelle de l’antisémitisme, ce qui a entraîné un recours croissant à celle-ci.
L’IHRA, anciennement Groupe de travail pour la coopération internationale sur la recherche, la mémoire et l’enseignement de l’Holocauste (ITF), est aujourd’hui composé de 33 pays membres, situés principalement en Europe et en Amérique du Nord. Créée en 1998, cette organisation supranationale s’est donné pour objectif « une coordination politique internationale […] visant à renforcer l’engagement moral des sociétés ainsi qu’à combattre le déni croissant de l’Holocauste et de l’antisémitisme ». À cette fin, elle vise à alimenter en connaissances et soutenir « les décideurs et les acteurs de l’éducation dans leurs efforts pour élaborer des formations efficaces ».[1]
Même si la Définition opérationnelle de l’IHRA est largement acceptée et appliquée, des objections ont été soulevées concernant les critères utilisés dans le document. C’est pourquoi la Fondation Rosa-Luxemburg et medico international ont mandaté un expert pour analyser cette définition et produire une opinion. Le rapport a été confié à un expert renommé de l’antisémitisme, Dr. Peter Ullrich, sociologue et anthropologue des cultures à l’Institut de recherche sur l’antisémitisme de l’Université technique de Berlin.
L’opinion d’expert a déjà été publiée en anglais et en allemand – le rapport complet est disponible en téléchargement à droite (PDF)
Son analyse de la Définition opérationnelle de l’IHRA en révèle d’importants défauts. Selon Ullrich, elle est « incohérente, contradictoire et formulée très vaguement. Elle ne répond pas aux exigences d’une bonne définition. »[2] Tandis qu’elle met l’accent sur certains phénomènes antisémites (la plupart en lien au conflit israélo-arabe) et sur certains niveaux d’analyse, la Définition opérationnelle fait une large impasse sur d’autres aspects essentiels, notamment sur le contexte de l’extrême droite et de l’extrémisme chrétien.
« Principalement au motif de ses faiblesses techniques, de son application pratique déficiente, de son statut juridique néanmoins partiellement contraignant et de son potentiel d’instrumentalisation, l’utilisation de la Définition opérationnelle de l’antisémitisme ne peut pas être recommandée. »[3]
(Ed.)
Notes
[1] Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, pays membres.
[2] Peter Ullrich, Opinion d’expert sur la « Définition opérationnelle de l’antisémitisme » de l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, p.3
[3] Ibid., Résumé