Symposium marxiste-chrétien sur les défis européens partagés

La première expérimentation du genre s’est déroulée les 31 mars et 1er avril 2016 à l’Institut universitaire Sophia près de Florence en Italie. Elle était conjointement organisée par la Congrégation pour l’éducation catholique du Vatican, le mouvement des Focolari et transform! europe. Dans leur déclaration commune sur les motivations de ce dialogue et son contenu, les trois partenaires déclarent :

« Face aux difficultés et dangers du monde actuel, toutes les personnes de bonne volonté ont pour devoir de s’unir indépendamment de leurs convictions philosophiques, de leur religion et de leurs approches pratiques et théoriques afin de trouver ensemble des voies de sortie de crise. Pour citer le pape François, il y faut à la fois de la transversalité mais aussi un dialogue qui transcende les clivages traditionnels (…). »

Les deux parties sont tombées d’accord pour établir un « plan de travail » afin de faciliter une meilleure compréhension réciproque ainsi que « pour dégager des analyses et des solutions suffisamment consensuelles et, là où c’est possible, pour définir des domaines d’action conjointe ».

Du côté des analyses partagées, il y a « la conviction que la Terre a été donnée à tout le monde, c’est-à-dire à l’humanité entière, générations futures comprises. Aussi notre coopération entend-elle contribuer à faire que chaque personne habitant notre planète puisse vivre une vie digne d’un être humain, dans la paix, la liberté et la justice. » La déclaration met aussi l’accent sur le fait que « les différences de départ sont perçues comme un enrichissement, tandis qu’elles peuvent en outre contribuer à la clarification, à l’approfondissement et à la communication des points de vue respectifs. »

La crise économique et environnementale, la justice sociale, la migration et les droits humains faisaient partie des principaux sujets discutés. On constatait une grande diversité chez les participant·e·s : universitaires, membres d’ONG, spécialistes en théologie, économistes, responsables politiques ou ayant charge culturelle. Les congressistes appartenaient par ailleurs à plusieurs générations. La délégation de transform! network se composait de Walter Baier (Vienne), Peter Fleissner (Vienne), Cornelia Hildebrandt (Berlin), Michael Löwy (Paris), Giulia Rodano (Rome). Quant au Saint-Siège, il était représenté par le secrétaire de la Congrégation pour l’éducation catholique du Vatican Vincenzo Zani et par Stefano Zamagni de l’Académie pontificale des sciences sociales. Une majorité de congressistes étaient proches du mouvement des Focolari : nos hôtes, Bernhard Callebaut et Paolo Frizzi de l’Institut universitaire Sophia, Catherine Belzung (France), Lorna Gold (Irlande), Alejandra Herrero (Argentine), Herwig Van Staa (Inssbruck), Franz Kronreif (Autriche) et Herbert Lauenroth (Allemagne). Participait également Pasquale Ferrara (Université européenne de Florence).

Les encycliques Evangelii Gaudium et Laudato Si du pape François et l’apport de celles-ci à une perspective critique, humaniste et fraternelle ont bien sûr alimenté les discussions de manière importante et ont servi de point de référence à la fois pour les catholiques et pour les marxistes.

On peut considérer que ce fut un événement d’ordre historique dans les relations entre la gauche européenne et l’Église catholique, relations qui ont connu des hauts et des bas nombreux par le passé. Le symposium a connu un succès évident du fait de la haute qualité des échanges et grâce aux relations humaines chaleureuses que le cadre favorisait. Les débats ont pris place dans une atmosphère d’amitié et de simplicité, tandis que les titres académiques et ecclésiastiques étaient délaissés au profit de l’usage des prénoms. Ce fut un authentique processus d’apprentissage réciproque et d’enrichissement mutuel. Certes, les opinions, concepts, priorités et solutions proposées pouvaient différer, mais on remarquait une ouverture authentique à « l’autre » ainsi qu’une volonté sincère de comprendre des points de vue différents.

Le diagnostic du pape qui voit la crise environnementale comme la résultante d’un « système structurellement pervers » a largement rencontré l’assentiment des congressistes, de même que la conviction qu’une autre voie est nécessaire face aux politiques d’« austérité » néolibérales absurdes et irrationnelles défendues par les élites européennes actuelles. La délégation transform! a organisé un débat sur les alternatives socialistes et écosocialistes visant le dépassement des modes capitalistes de production et de vie.

Commentant les échanges, Vincenzo Zani s’est dit désormais convaincu de la nécessité d’intégrer écologie et environnement dans l’enseignement catholique partout dans le monde. D’autres conclusions en partage ont concerné le besoin d’actions concrètes face au changement climatique et la nécessaire solidarité avec les personnes migrantes à la recherche d’un sanctuaire en Europe.

Ce n’est qu’un début ! Les organisateur·trice·s ont convenu de la nécessité de poursuivre cette initiative, de l’élargir, et d’approfondir les échanges. Une publication rassemblant les contributions faites lors du symposium est également en préparation.

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