Résumer les dynamiques néolibérales à du radicalisme de marché est fallacieux. Les acteurs néolibéraux, en Europe et dans le monde, forment une sphère mouvante et diverse. Tout examen de leurs réseaux doit donc d’abord éviter le piège de réductions simplistes. Ce constat vaut particulièrement dans le contexte des luttes pour l’après-Covid.
Résumer les dynamiques néolibérales à du radicalisme de marché est fallacieux. Les acteurs néolibéraux, en Europe et dans le monde, forment une sphère mouvante et diverse. Tout examen de leurs réseaux doit donc d’abord éviter le piège de réductions simplistes. Ce constat vaut particulièrement dans le contexte des luttes pour l’après-Covid.
Source: Djelic and Mousavi 2020, p. 261.
La crise financière mondiale de 2008 a popularisé l’idée que le projet néolibéral pourrait avoir définitivement échoué (« idées zombies ») et que la période actuelle constituerait un interrègne vers le post-néolibéralisme. Moins d’une décennie après la grande crise du capitalisme mondial financiarisé et du néolibéralisme, la pandémie a de nouveau paralysé l’activité économique tandis que, dans de nombreux pays, les systèmes sociaux sont au bord de l’effondrement. À la différence de la crise financière d’il y a dix ans, la crise actuelle peut être vue comme le résultat d’un choc externe. Mais l’impact du virus montre également le mauvais état du système de santé publique dans de nombreux pays, lesquels sont affectés par des décennies d’austérité et par le primat des idées néolibérales d’efficacité économique et de rentabilité. Les grandes puissances se sont montrées incapables de coordonner le développement et la distribution des vaccins face au défi mondial de la pandémie, dévoilant à nouveau l’échec de la préférence donnée à la compétitivité. Au lieu d’unir leurs forces pour faire face à un défi planétaire sous égide des Nations Unies, les principaux pays et blocs régionaux se sont engagés dans une rivalité impérialiste sur les vaccins et dans le nationalisme sanitaire. Assurément, on peut imputer avec raison à la transformation néolibérale du capitalisme des États providence les problèmes croissants actuels de destruction du cadre de vie, d’aggravation des inégalités sociales et de dévastation des infrastructures sociales (Goldman 2005, Malm 2020, Patel et Moore 2017).
Hélas, il nous faudra attendre de voir les prochaines étapes des crises multiples en cours pour savoir si l’on peut effectivement parler de la crise (terminale) du néolibéralisme. Plus probablement — et cela ne sera pas la première fois —, nous continuerons de vivre sous le néolibéralisme de crise en crise, plutôt que d’en voir la fin : on pense ici à la « marée rose » des gouvernements de gauche qui sont apparus de l’Argentine à la Bolivie en Amérique centrale et du Sud pendant le boom des matières premières des années 2000, marée qui avait cédé la place à un tournant néolibéral autoritaire (Plehwe et Fischer 2019). On pense aussi à l’ambition affichée du « New Labour » de procéder au dépassement du néolibéralisme à la fin des années 1990 en Europe, pour au final laisser les approches néolibérales entrer davantage dans la sphère des politiques de travail et d’emploi (« politiques d’activation » pour le retour sur le marché du travail des bénéficiaires d’aides, développement du travail indépendant sur fond de perte des avantages liés au salariat et d’abandon de la sécurité d’emploi de long terme).
Pour bien aborder les controverses et luttes de l’ère post-Covid, il est important de ne pas tomber dans le piège qui consisterait à s’attaquer à un faux archétype néolibéral, à une représentation erronée, facilement démystifiable, d’un néolibéralisme qui serait essentiellement un radicalisme de marché et un anti-étatisme. Si on doit mettre au grand crédit de Pierre Bourdieu (1998) ses efforts pour combattre « l’invasion néolibérale », défendre le social et attirer l’attention sur les figures du néolibéralisme, il nous faut considérer comme problématique voire fallacieuse sa représentation du néolibéralisme en tant que « pensée unique » — la « seule autorisée par une invisible et omniprésente police de l’opinion », comme l’a dit Ignacio Ramonet (Ramonet 1995). Pas plus que l’affirmation néolibérale « TINA » (« There is no alternative »), selon laquelle il n’existerait pas d’alternative à la privatisation et à la marchandisation, l’assertion qu’« il n’existe qu’un seul néolibéralisme » ne s’avère pas d’un grand secours pour différencier les partis et programmes néolibéraux. S’il y a bien en effet un noyau néolibéral, parler de radicalisme du marché est inutile pour aborder les efforts néolibéraux déployés en vue de sécuriser les droits de propriété et les rapports marchands, projet qui nécessite de s’assurer du contrôle de l’État et d’entrer en compétition avec les idéologies rivales dans de nombreux domaines des politiques publiques. Les expressions génériques telles que pensée unique ne peuvent guère être validées au regard de la diversité de la pensée intellectuelle néolibérale, et elles ne résistent pas mieux à un examen historique. Comme ses rivales, l’idéologie du néolibéralisme a connu en effet une évolution caractérisée par la diversité et la polyvalence de ses acteurs et de ses stratégies. Une simplification du néolibéralisme rend par ailleurs plus difficile l’évaluation des influences respectives des idées néolibérales et des forces sociales dans diverses arènes, nationales et internationales, telles que l’UE.
Trois scénarios types futurs peuvent être envisagés pour lire les évolutions en réponse aux réactions politiques fortes provoquées par la pandémie de coronavirus : tout d’abord, un vigoureux contre-mouvement capable de défendre une fois de plus le statu quo d’avant la crise, et qu’on a vu à l’œuvre déjà lors des politiques d’austérité 2.0 qui ont suivi la crise financière mondiale de 2008-2009 ; deuxièmement, un renoncement sélectif aux prérogatives du capitalisme d’austérité dans des domaines politiques spécifiques tels que la santé publique et les institutions publiques, par exemple par un déploiement continu d’une finance publique européenne un peu plus progressiste ; troisièmement, une combinaison de transformations progressistes et une nouvelle période longue propice aux initiatives en faveur de plus d’égalité sociale et de solidarité entre les personnes et avec la nature, à l’intérieur et à l’extérieur des frontières — la transformation majeure espérée par-delà le Green Deal.
Pour en revenir aux forces néolibérales, elles seront parmi les acteurs clés qui se battront en faveur du scénario a), mais étonnamment, elles peuvent se trouver fréquemment parmi celles qui se préoccupent d’élaborer le scénario b), tandis qu’enfin elles feront partie certainement de l’opposition la plus radicale et la plus constante au scénario c). Les scénarios qui se développeront dans la réalité ne se conformeront nullement aux scénarios types, mais oscilleront quelque part entre leurs pôles.
Pour nous permettre de comprendre la rationalité des réformes et trajectoires particulières, les scénarios types n’en fournissent pas moins des indications importantes.
Comment étudier le néolibéralisme de façon à évaluer les acteurs impliqués dans les projets politiques et mesurer les résultats des conflits de politiques ? Contrairement à l’idée qui voudrait que le néolibéralisme organisé s’apparente à une vaste conspiration, il est possible d’étudier les courants néolibéraux à la manière d’autres forces sociales, peut-être même mieux que ces dernières au niveau mondial en raison de leur propension au réseautage transnational, entre autres dans des associations comme la Société du Mont Pèlerin (MPS) ou les réseaux de think tanks comme le Réseau Atlas, ex-Fondation Atlas pour la recherche économique (pour la première voir Plehwe et Walpen 2006, Mirowski et Plehwe 2009, pour le second voir Djelic et Mousavi 2020). Ces réseaux d’intellectuel·le·s, d’organisations (essentiellement des think tanks, mais pas uniquement) et d’idées donnent l’occasion d’observer et suivre les activités et conversations néolibérales dans a) chaque différent pays et b) dans de nombreux domaines de politiques publiques.
Le graphique suivant montre la répartition des membres du Réseau Atlas dans le monde. Il est facile de voir que des efforts importants ont été faits pour développer une présence dans le Sud global en plus du cœur de l’Europe et des États-Unis. Dans le même temps, les chiffres font ressortir clairement une présence de think tanks néolibéraux nettement plus importante en Amérique centrale et du Sud (comparer Djelic et Mousavi 2020 pour plus de détails). Mais le Réseau Atlas n’est pas le seul acteur de la place. Tout comme les membres de la MPS fondée par Hayek et d’autres en 1947, les réseaux néolibéraux peuvent servir de point de départ pour repérer d’autres personnalités intellectuelles néolibérales — membres de conseils d’administration, personnels de think tanks, personnalités alliées ou sympathisantes dans les mondes de la recherche, des affaires, de la politique, de la société civile, ou encore des médias (voir Plehwe, Walpen et Neunhöffer 2006).
A useful way to learn about neoliberal assessments of European legislation is provided by the Centre for European Policy (CEP) in Freiburg, Germany. Founded in 2005, the think tank has become a major resource for neoliberal European policy making. CEP experts examine all European legislation considered relevant in many policy areas to evaluate agendas and proposals from a normative neoliberal perspective. From 2006 until 2019 CEP published 676 documents of various types and content. The following graph shows the distribution of CEP policy papers in different policy areas, and the broad assessment expressed with the traffic light system, with red representing rejection, green endorsement, and yellow neither of these two.
Source : Djelic et Mousavi 2020, p. 261,
pour une analyse approfondie, voir en ligne hdl.handle.net/10419/215796
Le nombre assez important de feux rouges et le nombre considérable de feux jaunes suggèrent que, à l’intérieur du camp néolibéral dans l’UE, se fait sentir un assez fort besoin de débat et une volonté d’influence en matière d’orientation des politiques européennes dès le stade de leur élaboration. Les marqueurs rouges et jaunes sur les propositions législatives individuelles vont indiquer de façon fiable les politiques susceptibles d’être populaires parmi le centre-gauche de l’échiquier politique.
Bien entendu, le grand nombre de signalements en rouge parmi les évaluations néolibérales ne signifie pas que l’UE est soudain devenue un univers progressiste. Les nombreux feux verts témoignent d’un soutien à de nombreux textes législatifs. Il ne faut pas oublier que de nombreux objectifs de gauche brillent surtout par leur absence dans l’agenda législatif européen. Il est néanmoins intéressant de regarder combien de textes législatifs de l’UE apparaissent comme discutables voire sont désapprouvés dans une perspective néolibérale (majoritairement allemande dans le cas présent, le think tank étant basé en Allemagne).
Une étude des réseaux néolibéraux à travers le temps révèle des périodes de lutte et de crise. Au cours des années 1950, les universalistes néolibéraux (comme Ludwig Erhard et Wilhelm Röpke) ont affiché leur opposition à l’intégration européenne, tandis que les constitutionnalistes du néolibéralisme (comme Hayek et Mestmäcker) ont apprécié cette opportunité de contraindre les législations nationales à des normes économiques supranationales (Slobodian 2018, chapitre six).
par Moritz Neujeffski
Source : Günaydin et Plehwe 2020.
Pour une analyse approfondie : The Neoliberal Legal Turn (Le tournant juridique néolibéral)
Au début des années 1960, Röpke et son entourage s’affrontent avec Hayek et les proches de celui-ci sur le contenu et le but de l’organisation néolibérale. Röpke était très attaché à une version conservatrice du néolibéralisme et à des positions politiques anticommunistes. Quant à Hayek, il expliquait pourquoi il ne se voyait pas lui-même comme un conservateur et voulait que les regroupements intellectuels s’investissent dans les luttes académiques et idéologiques, en s’abstenant autant que possible de toute déclaration politique ouverte (Walpen 2004). Dans les années 80, Murray Rothbard, élève de Ludwig von Mises, entre en rivalité avec ses collègues de la MPS Koch et avec Crane, qui préside l’Institut CATO. Rothbard cofonde alors l’Institut Mises à Auburn (États-Unis). Rothbard accuse le courant dominant néolibéral d’être élitiste et conventionnel et se cherche une alliance radicale bien plus à droite, du côté des extrêmes. Après avoir flirté avec la gauche antimilitariste dans les années 1960 et 1970, Rothbard se tourne vers ce qu’on appelle les paléoconservateurs, qui soutenaient les milices privées et le sécessionnisme, pour former une alliance entre eux et son propre groupe de paléolibéraux. À la différence des néoconservateurs, cette alliance n’a cessé de s’opposer à l’expansionnisme militaire. En 1992, Rothbard qualifie cette stratégie de populisme de droite (Rothbard 1992, Wassermann 2018). En 2006, Hans-Hermann Hoppe, disciple de Rothbard, fonde la Property and Freedom Society sur le modèle de la MPS, laquelle sert de point de convergence aux Instituts Mises qui se multiplient dans le monde. Le Réseau Atlas et le Property and Freedom Group ont connu une forte expansion après 2009, donnant à penser que les néolibéraux et leurs soutiens financiers n’ont pas renoncé à leur combat pendant la crise financière mondiale.
La scission Mises-Rothbard-Hoppe a fait réapparaître le terme « paléolibéral » dans les débats. Utilisé à l’origine de manière péjorative par Röpke et Rüstow pour attaquer les vues orthodoxes de Mises et, dans une moindre mesure, de Hayek, le terme a été repris par Llew Rockwell, partenaire fondateur de Rothbard, pour professer fièrement l’engagement envers une pure perspective anti-étatique radicale qui concerne et englobe le domaine du militaire et de la sécurité. Dans le courant dominant néolibéral, nous pouvons identifier parallèlement une mosaïque de positions de droite reflétant différentes traditions et collectifs de pensée, entre autres l’ordolibéralisme, l’école des choix publics de Virginie, l’école de Chicago en monétarisme, droit et économie, la perspective internationale de l’école de Genève, la géographie économique néolibérale fondée à Kiel, ou encore le néolibéralisme catholique récemment apparu de l’école de Navarre. Ces courants relativement incompatibles entre eux coexistent parfois pacifiquement, et parfois non. La Hayek Society allemande s’est disloquée en 2015. Deux groupes de ses membres — proches des partis allemands dominants de la CDU (conservateurs) et du FDP (libéraux) — ont quitté la Hayek society après avoir échoué à en évincer les membres socialement plus conservateurs et néo-nationalistes, fortement proches du parti de droite extrême AfD. Les groupes néolibéraux modérés se sont réunis dans un nouveau Réseau pour l’économie constitutionnelle et la philosophie sociale (NOUS). Les instituts Mises radicaux et les groupes modérés tels que le réseau NOUS continuent de se croiser et fréquenter, à la fois dans les cercles du MPS et dans le réseau Atlas, mais ils divergent clairement sur de nombreuses questions, par exemple les cercles néolibéraux européens sur la question de Maastricht et de l’union monétaire (Slobodian et Plehwe 2019).
La diversité peut être un handicap, mais elle peut aussi être une source de force et d’opportunités. Bien des groupes de réflexion et expert·e·s du néolibéralisme se préparent à retourner au capitalisme d’austérité après la pandémie de Covid-19 — et à démontrer avec empressement que les concessions faites en face de la pandémie n’avaient qu’un caractère temporaire. Mais d’autres cercles néolibéraux identifient des similitudes entre le moment présent et la crise du libéralisme dans les années 1930. Dans une allusion délibérée à l’événement fondateur du néolibéralisme mondial, le Colloque Walter Lippmann de 1938 à Paris, le réseau NOUS a récemment organisé une nouvelle conférence Lippmann.
Dans son étude de l’idéologie conservatrice, Karl Mannheim exposait que les visions du monde doivent s’adapter aux nouveaux défis en intégrant des éléments de succès de leurs concurrents. Cette conception permet d’expliquer les permutations des idées néolibérales dans les systèmes de pensée sociaux-démocrates et conservateurs. Elle permet également bien de comprendre pourquoi les courants néolibéraux feront partie de la conversation dans le cadre du deuxième scénario prospectif évoqué précédemment, à savoir une sortie partielle du capitalisme d’austérité dans une tentative de juguler les crises de la santé publique et du climat. Mais les orthodoxies sauront également se trouver des partenaires et une légitimité dans des batailles d’arrière-garde, par exemple pour garantir les droits de propriété dans le secteur des fossiles. En raison des circonstances de l’époque, les tensions à l’intérieur des réseaux néolibéraux vont sans doute s’intensifier, mais il ne faudrait surtout pas que cela conduise à écarter d’un revers de main prématuré, une fois de plus, l’univers productif des idées néolibérales, ni les forces sociales et groupes qui les portent.
RÉFÉRENCES
Pierre Bourdieu (1998): Acts of Resistance Against the Tyranny of the Market. New York: The New Press.
Marie Laure Djelic/Reza Mousavi (2020): How the Neoliberal Think Tank Went Global. The Atlas Network, 1981 to the Present. 257-282. In: Dieter Plehwe, Quinn Slobodian and Philip Mirowski (Eds.): Nine Lives of Neoliberalism. London: Verso.
Michael Goldman (2005): Imperial Nature. New Haven: Yale University Press.
Kardelen Günaydin/Dieter Plehwe (2020): The Neoliberal Legal Turn. Online: thinktanknetworkresearch.net/blog_ttni_en/the-neoliberal-legal-turn/
Andreas Malm (2020): Corona, climate, chronic emergency. War communism in the twenty-first century. London: Verso.
Philip Mirowski / Dieter Plehwe (Eds.) (2009): The Road from Mont Pèlerin. The Making of the Neoliberal Thought Collective. Cambridge: Harvard University Press.
Rajeev Charles Patel / Jason Moore (2017): A History of the World in Seven Cheap Things. A Guide to Capitalism, Nature, and the Future of the Planet. Oakland: University of California Press.
Dieter Plehwe / Karin Fischer (2019): “Continuity and Variety of Neoliberalism. Reconsidering Latin America’s Pink Tide”. In: Revista de estudos e pesquisassobre as Américas, Vol. 13, No. 2, p. 166-202.
Dieter Plehwe, Bernhard Walpen and Gisela Neunhöffer (Eds.) (2006): Neoliberal Hegemony. A Global Critique. London: Routledge.
Ignacio Ramonet (1995): La pensée unique. Le Monde diplomatique. https://www.monde-diplomatique.fr/1995/01/RAMONET/6069 (last accessed April 28, 2021).
Murray Rothbard (1992): Right wing populism: A strategy for the paleo-movement. Rothbard Rockwell Report 3 (January) 5-14.
Quinn Slobodian (2018): Globalists. The end of empire and the birth of neoliberalism. Cambridge: Harvard University Press.
Quinn Slobodian/Dieter Plehwe (2019): “Neoliberals against Europe”. In: William Callison/Zachary Manfredi (Eds.): Mutant Neoliberalism. Market Rule and Political Rupture. New York, NY: Fordham University Press, S. 89-111.
Bernhard Walpen (2004): Die offenen Feinde und ihre Gesellschaft. Hamburg: VSA Verlag.
Janek Wasserman (2018): The Marginal Revolutionaries. How Austrian Economists Fought the War of Ideas. New Haven: Yale University Press.